L’assurance-vie comme mode de financement des PME : où en est le gouvernement ?
Le 22 janvier dernier se tenait à Paris le Grand Rendez-vous de l’investissement productif. À cette occasion, les acteurs financiers se sont réunis pour discuter des alternatives afin d’inciter les français à privilégier l’investissement dans les PME et les ETI.
Cette initiative, menée par la députée Amélie de Montchalin (LREM), s’inscrit dans la continuité des actions réglementaires mises en place récemment ou encore discutées par le gouvernement. L’orientation de l’épargne vers les PME doit s’organiser en trois temps :
Détourner les français de l’investissement immobilier
Afin de relancer l’investissement dans l’économie réelle, le gouvernement a fait le choix de deux réformes majeures :
La création d’un prélèvement forfaitaire unique
La loi de finances pour 2018 prévoit la mise en place d’un Prélèvement forfaitaire unique (PFU), qui réduira les prélèvements sur les revenus du capital. En effet, ce PFU de 30% concernera les valeurs mobilières, et non les Livrets A et PEA qui conserveront donc une fiscalité avantageuse. De plus, cette « flat tax » représentera un allégement de la fiscalité sur les placements des contribuables les plus aisés, en réduisant l’imposition à un taux semblable de celui des pays voisins. Ainsi les économies réalisées grâce à l’abattement du taux pourront être réinvestis.
La mise en place d’un impôt sur la fortune immobilière (IFI) en remplacement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF)
L’objectif de cette mesure est de réinjecter directement dans les investissements financiers le patrimoine des français. En effet, l’IFI conserve le seuil d’1,3 M€, les taux et l’abattement de 30% sur la résidence principale, cependant les portefeuilles de titres ne sont plus pris en compte dans l’assiette imposable. Ainsi, la vente de biens immobiliers peut être envisagée au profit d’investissements afin de réduire ou même supprimer l’impôt.
Orienter l’épargne vers les PME et les ETI
L’épargne et le financement des PME sont devenus aujourd’hui compatibles et ce, grâce à plusieurs initiatives :
La déclinaison du PEA en PEA-PME
Le PEA-PME est une variante du Plan Épargne Actions destiné à l’investissement dans les PME entrée en vigueur en 2014. Avec un plafond de 75K€, le PEA-PME possède la même fiscalité qu’un PEA classique. L’intérêt du PEA-PME est qu’il peut être cumulable avec un PEA classique. Il cible les entreprises de moins de 5000 employés et dont le chiffre d’affaire annuel est inférieur à 1,5 milliard d’euros. Les titres acquis par le biais d’un PEA-PME peuvent être des parts de sociétés, des actions, des titres assimilés…
L’objectif du gouvernement est aujourd’hui de simplifier les conditions de commercialisation de ce type de PEA afin d’inciter un plus grand nombre de français à investir dans les PME par ce biais.
Le PERCO Plus comme alternative au PERCO classique
La loi Macron définit un taux réduit de forfait social pour les PERCO (Plan d’Épargne pour la Retraite Collective) qui investissent au minimum 7% de l’épargne des salariés sur des titres PME-ETI. Ainsi la contribution acquittée par les employeurs qui proposent ce plan d’épargne à leurs employés est de 16% au lieu de 20% pour un plan d’épargne PERCO classique.
Par ailleurs, le gouvernement continue de s’interroger sur de nouvelles réformes dans la continuité de ces dernières, comme par exemple :
Une modulation des contrats en euro
Bien que les rendements diminuent au fil des années, les français demeurent friands des contrats euros. Contrairement aux contrats en unités de compte (UC), les fonds euros garantissent au souscripteur de récupérer à minima le capital investi : il s’agit donc de contrat peu risqués et par conséquent peu rentables. L’objectif de l’évolution est de réduire le nombre de retraits grâce à une fiscalité aménagée afin de privilégier des investissements à plus-long terme. Cela permettra ainsi aux assureurs d’investir de façon plus risquée, notamment dans les PME et in-fine de proposer de meilleurs rendements.
Le projet de loi « PACTE »
Le projet de loi, prévu pour le printemps 2018, doit permettre aux PME d’innover et s’internationaliser. Pour ce faire, le gouvernement a proposé à des binômes (un chef d’entreprise et un parlementaire LREM-Modem) de réfléchir pendant plusieurs semaines sur différentes thématiques. Pour n’en citer que quelques-unes : l’internationalisation, la numérisation et l’innovation, le financement etc… Au total, 980 propositions ont été déposées à l’issue de cette phase de réflexion. Concernant le financement, la création d’un PEA pour les jeunes, la simplification de l’accès des PME aux marchés boursiers ont été notamment proposées… Ces propositions figurent sur le site du gouvernement afin de permettre de récolter l’avis des français sur ces sujets et ainsi aboutir à un projet de loi au printemps 2018.
Sensibiliser les français à la prise de risques
Malgré toutes ces réformes, le véritable frein au financement des PME/ETI par l’épargne demeure la préférence des ménages en faveur de la liquidité et non de la prise de risques. En effet, alors que l’épargne est abondante en France (3600 milliards d’épargne financière), les français investissent davantage dans l’immobilier ou dans des fonds sans risques (via l’assurance vie traditionnelle) qui proposent pourtant de plus faibles rendements.
Au contraire, les contrats en « capital investment » (contrats d’assurance-vie sur des fonds spécialisés dans les PME introduits par la loi Macron de 2015) ne connaissant pas le même succès alors qu’ils proposent des rendements plus élevés (environ 8,7% contre moins de 2% pour les contrats d’assurance vie classique)
Bien que l’évolution de la réglementation tende à inciter de plus en plus les particuliers à faire le choix de nouveau type d’épargne, cette transition ne pourra se faire sans l’aide des conseillers bancaires et en assurances. En effet, les français demeurent mal renseignés au sujet des produits bancaires existants et la majorité des investissements ont lieu à travers des organismes de placement. Il est donc nécessaire de former les conseillers bancaires afin qu’ils soient en mesure de vendre des produits plus risqués. Dans la même optique, l’AMF prévoit la création d’un portail numérique afin de former directement les particuliers aux différents types de produits financiers.
Rappelons cependant que l’objectif de ces mesures n’est pas de réorienter la totalité de l’épargne de l’hexagone vers les PME : il suffirait que 0,5% de l’épargne des français soit investie dans les PME afin de permettre à celles-ci d’innover et de s’exporter à l’international et ainsi leur garantir un avenir plus prometteur …