Des Seniors aux Silver assurés : nouveaux modes de communication et enjeux
Semaine thématique : la silver économie et l’assurance – article 2/4
Derrière le terme « seniors » se trouve une diversité de situations. On y trouve aussi bien des actifs de 50 ans, des retraités dynamiques que des personnes âgées et dépendantes. Les assureurs doivent prendre note de cette diversité de profils et donc de besoins. Il est essentiel de proposer une communication adaptée, tant en termes de messages que de canaux.
Un nouveau profil de Silver consommateurs
Les Seniors : une catégorie de consommateurs croissante et hétérogène
A quel âge est-on senior ? En France, les pouvoirs publics considèrent que la catégorie des seniors débute entre 60 et 65 ans car c’est à cet âge que les individus bénéficient de prestations sociales spécifiques. Aujourd’hui, environ ¼ de la population française a plus de 60 ans. L’Insee estime que le nombre de personnes de plus de 85 ans devrait doubler entre 2005 et 2020. Cette évolution démographique représente plus que jamais un enjeu économique et social, comme l’atteste la mise en place, en 2016, d’une loi portant sur l’adaptation de la société au vieillissement.
Pour les professionnels du marketing, la catégorie « senior » débute à 50 ans. Ce segment est souvent délaissé par les entreprises, qui y voient des acteurs plus prompts à épargner qu’à acheter. Pourtant, les plus de 50 ans sont à l’origine de 52 % de la consommation en France. De plus, leurs habitudes et comportements de consommation ont considérablement évolué au cours des dernières années. Les nouveaux seniors auraient une attitude plus hédoniste que leurs ainés. La génération du papy-boom, qui a connu les Trente Glorieuses et l’avènement des loisirs, entend bien profiter de sa retraite. Autre aspect non négligeable, les seniors ont aujourd’hui un pouvoir d’achat plus élevé que les ménages actifs et un patrimoine supérieur.
Face à ce marché croissant, les acteurs économiques parlent désormais d’or gris ou de Silver Economy. Le salon des seniors, qui s’est tenu en mai dernier, témoigne du boom de ce marché. Il associe aux seniors des thèmes nouveaux, tels que les nouvelles technologies ou la question du travail après 50 ans. Mais si les études visant à décrypter les générations X, Y, et les Millenials se multiplient, la compréhension des seniors reste à approfondir. Un papy boomer aura en effet des aspirations et un mode de vie très différents de celui d’une personne de 80 ans. Il est donc indispensable de repenser la segmentation des consommateurs de plus de 55 ans.
Des seniors … qui ne veulent plus être considérés comme tels !
Acheter des biens ou des services adaptés aux seniors est perçu négativement, notamment par les seniors eux-mêmes. Souvent plus ergonomiques, simplifiés et privilégiant le confort à l’esthétique, ces produits renvoient les seniors à l’amoindrissement de leurs aptitudes physiques et au vieillissement… sujet qu’ils souhaitent aborder le plus tard possible ! L’une des grandes tendances de la Silver Economy est de renverser le cliché du senior avachi devant sa télé en robe de chambre. Les « Boomers » (55 – 70 ans) sont à l’inverse de plus en plus connectés et actifs. Ce phénomène n’a pas échappé au secteur de l’assurance. Celui-ci tente de séduire les seniors grâce à l’utilisation des technologies modernes. La marque Europ Assistance a par exemple recruté les dernières égéries de sa campagne via Facebook. L’objectif est de parler aux « jeunes seniors » et de les séduire en leur renvoyant une image actualisée.
Le groupe Henner est allé encore plus loin en 2014 avec une campagne humoristique et provocatrice associée au slogan : » changer les règles, il n’y a plus de vieillesse ». L’entreprise a mis en scène la star du web Mamika (plus de 25.000 likes sur Facebook) dans une série de visuels décalés. Cette stratégie de communication vise à décomplexer les clients face à des sujets anxiogènes tels que la dépendance ou la préparation des obsèques.
Quelques bonnes pratiques pour le secteur de l’assurance : messages, canaux et nouvelles technologies
Vieillesse, dépendance, obsèques : comment appréhender ces sujets anxiogènes ?
Pour le secteur de l’assurance, le marché des seniors est porteur d’enjeux de croissance mais nécessite une approche subtile. Il est crucial pour les assureurs de bien comprendre les Silver consommateurs en actualisant continuellement leurs données afin d’affiner leur stratégie de communication.
Concernant les éléments de formes, la clarté des informations et le choix des visuels sont déterminants. En voulant maintenir ces sujets éloignés, de nombreux clients ignorent le coût des obsèques ou les conséquences de la perte d’une source de revenus. Au-delà de sa visée commerciale, la communication des assureurs doit donc mettre en valeur l’information. Un discours superficiel ou mal-présenté sera dissuasif pour les consommateurs avisés et matures que sont les seniors. Pour le choix des visuels, le senior sera rassuré par une image évoquant les liens familiaux. Une erreur souvent commise est de choisir des protagonistes trop âgés. En effet, les plus de 60 ans ont plutôt tendance à se reconnaître dans des acteurs plus jeunes d’une quinzaine d’années.
Pour le contenu du message, il n’y a malheureusement pas de recette miracle. Tout l’enjeu pour le conseiller est d’adapter son discours aux sensibilités individuelles. En effet, promouvoir des assurances obsèques et décès implique l’évocation de sujet angoissants et parfois tabous pour certaines populations. L’une des approches possibles est de responsabiliser le senior. Comment? En l’incitant à acheter un produit pour anticiper les risques liés à la vieillesse et protéger ses proches. C’est le message qu’a choisi un assureur bien connu pour sa gamme de produits de prévoyance avec le slogan « il faut penser au pire pour ne plus y penser ». Cela illustre bien cette idée d’aborder une bonne fois pour toutes les sujets difficiles afin de jouir d’une tranquillité d’esprit par la suite. L’utilisation d’une sémantique positive est également une piste à privilégier. Ainsi, on préfèrera les mots « santé » et « vitalité » à « maladie » et « dépendance ».
Quels canaux de communication pour toucher les seniors dans l’Assurance ?
Une fois le message construit, il faut définir les canaux de transmission. Cette étape nécessite également une étude approfondie de la diversité des nouveaux consommateurs seniors et de leurs comportements. Comment les assureurs peuvent-ils toucher les seniors du 21ème siècle ? L’une des principales idées reçues sur les seniors est qu’ils ne font pas confiance aux nouvelles technologies. Or, on compte de nombreux adeptes du e-commerce parmi les 55-70 ans. Ainsi, 69% d’entre eux recherchent des informations sur les produits. Près de 50% comparent les prix et lisent les commentaires. Plus surprenant encore : plus d’un sexagénaire sur quatre est membre d’un réseau social, créant ainsi un nouveau canal de communication online.
Deux nuances doivent cependant être apporté à cette digitalisation du marché des seniors :
- A l’heure des Silver Surfers la télévision reste la star des moyens de communication. On compte 2h de visionnage par jour minimum pour plus de 70% des seniors. Ces derniers aiment aussi prendre le temps de la réflexion et revenir plusieurs fois sur les informations. Un support tangible de type brochure représente un complément efficace à une campagne TV.
- Par ailleurs, tous les canaux ne sont pas utilisés de façon homogène. Le smartphone en est l’exemple. Il manque d’ergonomie en raison de la taille réduite de l’écran et du clavier. De ce fait, les seniors ne lui font pas confiance pour les opérations online.
Par conséquent, pour les moins de 70 ans, les assureurs peuvent légitimement mettre en place une communication multicanale s’appuyant sur des diffusions online et offline. Pour les plus âgés, les canaux traditionnels restent à privilégier.
L’utilisation des nouvelles technologies pour améliorer les services dédiés aux seniors
Aujourd’hui, face à des seniors de plus en plus connectés, la digitalisation des offres et des parcours clients constitue un avantage compétitif. Les nouvelles technologies peuvent être intégrées au niveau des canaux de communication, de distribution, au sein des offres et peuvent assister le conseiller. Les applications et les interfaces online personnalisées enrichissent le parcours client senior. Des offres originales se multiplient. On peut citer la Care Box digitale d’Europ Assistance qui accompagne les seniors dans leur découverte des nouvelles technologies. La Société Générale surfe de son côté sur la tendance des objets connectés. Son offre « Garantie Autonomie Senior » inclue le dispositif Silver Mother facilitant le maintien à domicile. Pour le secteur de l’assurance, le développement de la Télémédecine représente également une opportunité indéniable. Grâce aux progrès de la technologie, le suivi médical ou certains soins peuvent être réalisés tout en évitant aux personnes âgées de se déplacer.
Enfin, les nouvelles technologies peuvent intervenir en support aux conseillers pour proposer un accompagnement toujours plus adapté. L’enjeu est de passer d’une segmentation par l’âge à la prise en compte des parcours de vie individuels des seniors. L’intelligence artificielle par exemple permettrait de suggérer aux conseillers les canaux de communication les plus adaptés en fonction des habitudes de fréquentation.
La silver economy offre de belles opportunités aux assureurs notamment via la création de nouvelles offres et l’intégration de nouvelles technologies. Cependant, face à des sujets sensibles et à des consommateurs matures, la formation des conseillers, notamment des plus jeunes, reste un défi majeur afin de les conforter dans leur légitimité et leur crédibilité.