Intermédiaire entre l’assureur et l’assuré, le courtier est une figure importante de la distribution d’assurance. Pourtant, entre les réglementations toujours plus contraignantes et la menace d’ubérisation, le courtier doit évoluer dans un environnement peu favorable. Le déclin du métier de courtier est-il inévitable ? Quels sont les leviers envisageables pour garantir sa pérennité ?

Un marché du courtage en croissance mais hétérogène

Le courtier est un intermédiaire mandaté par un client afin de trouver l’offre la plus adaptée à ses besoins. Il accompagne le client dans la souscription de son contrat, mais aussi dans la gestion de sinistre, qu’il gère lui-même ou délègue. Il peut également réaliser des prestations de conseil, par exemple en gestion des risques ou vente de produits financiers. Sa rémunération repose ainsi sur les commissions rétrocédées par les compagnies d’assurance (en % des primes), sur des honoraires dans le cas des prestations réalisées pour les entreprises, et sur la vente de produits financiers.

Si la concurrence s’est accrue avec l’arrivée des bancassureurs et des acteurs du Web, les intermédiaires (courtiers et agents généraux) ont su résister. Avec un chiffre d’affaires en hausse de 1,5% en 2015 et de1,8% (est.) en 2016 (source : Xerfi), les courtiers demeurent des distributeurs de poids sur le marché de l’assurance. La situation est toutefois différente selon les risques couverts et les segments de clientèle. En effet, face à la pression sur les prix des assurances auto et habitation, les courtiers voient leurs marges réduites dans l’assurance dommages aux biens pour les particuliers. Néanmoins, la situation leur est plus favorable sur le segment des professionnels, dont la reprise économique favorise l’achat d’une assurance de qualité et de prestations de conseil.

On distingue toutefois une multiplicité d’acteurs et donc de situations sur ce marché où les petits courtiers indépendants côtoient de grands groupes de courtage, des courtiers spécialistes, des groupes généralistes, des courtiers sur Internet ou encore des grossistes. Ces derniers ont un positionnement différent des courtiers traditionnels : ils conçoivent des offres dont le risque est porté par des assureurs, et prennent en charge les activités de gestion et de commercialisation dans un réseau d’apporteurs. Selon leur taille, les courtiers ont ainsi des rôles et des stratégies différents qui influent sur leur capacité à résister à la concurrence.

 

Un métier soumis à de nombreuses pressions

réglementationL’une des premières préoccupations des courtiers est la forte pression réglementaire (cf étude Xerfi, « Le courtage d’assurance », 25 avril 2016). Les courtiers sont tout d’abord concernés par Solvabilité II, qui impose aux assureurs de veiller au professionnalisme de leurs intermédiaires et au niveau de qualité et de sécurité de leur système d’information. La gestion des risques devant être mieux maîtrisée, les assureurs deviennent très sélectifs dans le choix de leurs délégataires, qui doivent faire preuve de transparence et sont soumis à des audits. Une deuxième réglementation a un fort impact sur les courtiers : l’ANI. Si elle entraîne une perte de contrats individuels, elle donne aux courtiers l’opportunité de se positionner sur les surcomplémentaires et les contrats collectifs, notamment pour les actes de gestion qui sont souvent délégués par les assureurs. En plus de voir leurs commissions sur les produits financiers menacées par MIF2, qui préconise un conseil indépendant -donc sans rétrocession de commissions-, les courtiers devront faire preuve de plus de transparence sur leur rémunération sur l’assurance-vie avec DIA 2. Ils doivent ainsi s’adapter à un environnement moins favorable découlant de ces réglementations.

Par ailleurs, le numérique est également source de bouleversements pour les courtiers. D’après une étude de Roland Berger, le métier de courtier en assurance est l’un des plus impactés par le numérique. Outre la menace des comparateurs (lesfurets.com, lelynx.fr, …) et des courtiers en ligne (par exemple, Santiane ou AssurOne Group), les courtiers risquent de subir l’automatisation de certaines tâches au moyen de logiciels. Le numérique constitue toutefois une source d’opportunités pour les courtiers, auxquels il offre une meilleure connaissance des clients, une rapidité de traitement et une simplification des processus, leur permettant de réduire leurs coûts de gestion et de renforcer leur rôle de délégataires.

 

Une nécessaire valeur ajoutée à offrir

Face à une concurrence accrue et à la volatilité de clients mieux informés sur les offres du marché, il est indispensable pour les courtiers de se différencier. Pour ce faire, une première option est la spécialisation sur un type de risque ou un segment de clientèle (par exemple, les professionnels) ou le positionnement sur des marchés de niches, qui sont synonymes d’expertise pour les clients. La personnalisation des offres est également un facteur important. Tandis qu’une offre standardisée adresse de la même manière des clients aux besoins différents, une offre plus adaptée à un segment de clientèle, voire sur-mesure, permettra de mieux répondre aux besoins et de fidéliser par là même les clients.

La maîtrise du numérique est un réel levier  de différenciation et d’optimisation de la relation client. Le numérique permet d’élaborer de nouvelles offres : le Big Data est par exemple utilisé en actuariat afin d’établir des tarifications différenciées selon le niveau de risques des clients. Les objets connectés sont quant à eux sources de données qui permettent de développer des offres innovantes et adaptées aux clients, à l’instar du « Pay as you drive » de Solly Azar. Outre des produits différents, le numérique permet de développer de nouveaux services qui améliorent l’expérience client. Solly Azar en est encore un exemple avec la création de sa Solly Box. Cette future plateforme accessible au client, au courtier et au grossiste facilitera les échanges entre eux et garantira un accès aux informations relatives aux contrats détenus par l’assuré. De nombreux courtiers voient eux aussi dans le numérique des opportunités pour accroître la proximité avec leurs partenaires et leurs clients. Ils utilisent de plus en plus fréquemment les réseaux sociaux, les chats et les solutions sur mobile afin de renforcer la relation client en offrant une plus grande rapidité dans les échanges. Le numérique donne ainsi l’opportunité aux courtiers d’améliorer l’avant-vente, mais aussi la gestion des contrats et des sinistres. Mieux encore, il permet aux courtiers de renforcer leur valeur ajoutée et de se positionner sur le créneau de la prévention, à l’instar de Novélia et de ses alertes en temps réel sur mobile qui permettent d’informer les assurés sur des risques imminents.

Ainsi, si les courtiers résistent pour aujourd’hui  sur le marché de la distribution d’assurance, ils sont confrontés à des coûts d’acquisition client en hausse, et sont à la recherche d’une taille critique pour contenir l’érosion de leurs marges. Afin de maintenir leurs positions sur le marché et sortir du rôle d’intermédiaire auquel ils sont cantonnés,  les courtiers doivent offrir une valeur ajoutée à leurs clients, que ce soit par des produits innovants et sur-mesure, ou par des services à forte valeur avec un apport d’expertise.