Toute entreprise qui réalise tout ou partie de ses activités à l’international sait que les risques pays sont un élément non négligeable de son organisation et de son développement. Le climat politique, la fluctuation économique ou encore le déséquilibre environnemental sont autant de facteurs qui influent sur son activité commerciale. Pour l’année 2016, la Coface entrevoit une résurgence des risques pays et met en exergue l’impact de trois facteurs : la baisse du prix du pétrole, le ralentissement chinois et le surendettement des entreprises des pays émergents.
Dès lors, quelles sont les causes et conséquences de ces risques pays et comment les entreprises peuvent-elles s’en prémunir ?
Le risque pays : une réalité hétérogène
La définition du risque pays établit par l’Afnor est la suivante : « Le risque pays peut être défini comme le risque de matérialisation d’un sinistre résultant du contexte économique et politique d’un État étranger dans lequel une entreprise effectue une partie de ses activités. Nous distinguons deux composantes principales du risque pays : le risque politique et le risque économique. »
Nous pouvons ajouter à cette définition les risques climatiques, sociaux, géopolitiques. Les risques pays couvrent donc des réalités très diverses.
Prenons les risques climatiques pour exemple. L’intensité et la fréquence croissantes des aléas climatiques (inondations, sécheresses, submersions marines et tempêtes) impactent à moyens termes les entreprises qui s’aventurent dans les pays les plus touchés. La France n’est d’ailleurs pas en reste : l’Ogéod estime ainsi à 92 MD€ le coût du changement climatique pour les assureurs en France d’ici 20 ans.
Une résurgence des risques pays pour 2016
En janvier dernier, la Coface a publié son étude sur les risques pays et dévalue la note de certains pays développés comme le Canada et le Japon. Elle met en cause la baisse des prix du pétrole, le ralentissement de l’activité chinoise dans les pays avancés et l’endettement excessif des entreprises des pays en développement.
Le maintien des niveaux de production du pétrole malgré la moindre demande et le futur retour de l’Iran sur le marché a sensiblement fait baisser le coût du baril. En conséquence, les cours de bourse sont perturbés (moins 4% pour l’action Total) et les pays dépendant du pétrole se sentent menacés, gèlent les investissements (ex : l’Algérie) et limitent la croissance de l’emploi et le développement des infrastructures.
Autre inquiétude majeure pour 2016 : le surendettement des entreprises des pays émergents. Dans son rapport sur la stabilité financière, le FMI l’estime à 3000 MD$. La Chine, le Brésil, le Chili et la Turquie sont particulièrement concernés. Ceci s’explique par le fait que les entreprises ont fortement utilisé les leviers financiers et pris des engagements en devises. Or, ces initiatives les rendent plus sensibles aux durcissements des conditions financières mondiales.
Enfin, le ralentissement chinois redistribue toutes les cartes du jeu. La Chine passe d’une croissance à 2 chiffres à une croissance estimée à 6,8% cette année. Selon Jean-Michel Quatrepoint, l’empire du milieu a du mal à adopter une économie boostée par la consommation intérieure plutôt que par les exportations et investissements massifs dans les infrastructures et l’immobilier. De plus, la lutte contre la corruption, entamée par Xi Jinping, fait fuir les capitaux à l’étranger, lesquels ne sont plus rapatriés. À cela s’ajoute la dévaluation du Yuan et la hausse de la spéculation sur les marchés financiers, alimentée par la population chinoise.
Quelles solutions pour se prémunir contre les risques pays ?
Plusieurs organismes, privés ou publics, proposent des solutions d’assurance contre les risques pays. On compte notamment Marsh, qui propose une expertise des risques politiques et un accompagnement local, Coface bien sûr, dont la spécialité est l’assurance-crédit, ou encore Platus. Les organismes publics d’incitation aux investissements internationaux proposent aussi des assurances afin de servir leurs objectifs. La MIGA offre « des garanties contre les risques politiques, lesquels peuvent se manifester sous la forme d’inconvertibilité des monnaies et de restriction aux transferts ; d’expropriation, de guerre, de terrorisme et de troubles civils ; de rupture de contrat ; et de non-respect des obligations financières souveraines. » De son côté, l’Agence pour l’assurance du commerce en Afrique tente de faciliter l’accès à l’assurance-crédit, l’assurance-risque politique, la couverture contre l’insolvabilité et la protection de l’investissement direct étranger.
Les risques pays, au premier rang desquels le risque terroriste, sont entrés depuis plusieurs années dans le top 10 des principaux risques identifiés par les entreprises. Loin de retomber dans l’oubli, ces risques demeurent, avec les turbulences politiques survenues ou pressenties en 2016, un sujet de vigilance pour l’ensemble des acteurs de l’économie mondiale – PME, grandes entreprises, États ou organisations internationales.
Dans ce cadre, les assureurs continueront sans aucun doute à jouer pleinement leur rôle dans la gestion et la prévention des risques. D’ailleurs une récente note de conjoncture sur les marchés de l’assurance en 2016 montre que le marché « Terrorisme et sabotage » est toujours en plein développement du côté des compagnies qui, avec près de 2 Md€, ont augmenté de plus de 10% leurs capacités financières sur le sujet par rapport à l’année 2015. Signe que les entreprises ne seront pas seules à affronter les turbulences.