Voilà 10 ans que le Dossier Médical Personnel ou DMP a fait son apparition en France. Aujourd’hui le constat est amer et la facture est lourde. Dans le même temps, les États-Unis ont lancé un programme au constat similaire. L’apport du DMP serait pourtant réel pour le patient, le médecin, l’état et les assureurs mais les blocages sont actuellement trop élevés.

Parallèlement, l’engouement autour des objets connectés et des applications mobiles de santé favorisant le stockage de masse de données et leurs traitements pourrait amener un second souffle à ce dossier qui en manque cruellement du côté de l’oncle Sam et du notre.

Qu’est-ce que le DMP ?

Le DMP a été lancé en 2004. Il se voulait être notre carnet de santé 2.0. Accessible via Internet, gratuit, rapide d’accès il devait être un facilitateur pour le patient ainsi que pour le personnel soignant avec pour vocation première d’améliorer la qualité des soins en facilitant la coordination et les échanges d’information entre les professionnels de santé.

Les raisons de l’échec

En France

Site d'information du Dossier Médical Personnel - DMP - Google ChromeIl y avait à peine plus de 500 000 Dossiers Médical Personnels créés début 2015 (…en 11 ans de carrière!). Un projet colossal qui a déjà englouti 500 millions d’euros pour un résultat quasi nul : moins d’1% des Français possède un DMP et son utilisation semble être peu répandue…

 

Alors, pourquoi un tel échec, alors que le DMP est a priori une bonne idée ?

Ni les patients ni les médecins ne semblent y trouver une utilité. Les médecins traitants stockent les données de leurs patients et ne voient pas d’intérêt à partager sur la vaste nébuleuse qu’est le web. De plus l’interface semble souffrir d’une ergonomie médiocre pour quiconque souhaiterait alimenter un dossier.

Aux États-Unis

EHR & EMR for the iPad - Electronic Health Record Apps - drchrono - Google Chrome_2Le lancement, fin des années 2000, du dossier médical électronique semble avoir rencontré les mêmes difficultés qu’en France. De multiples systèmes existent, comme par exemple l’application pour iPad DrChrono. Ces systèmes ne sont pas nécessairement compatibles entre eux et les sources de données sont loin d’être normalisées, ce qui permettrait une intégration facile et rapide. Enfin le manque d’ergonomie comme l’atteste le lancement en 2012 d’un concours pour repenser le dossier, explique le désintérêt des professionnels.

Le DMP version Google ou Apple ?

2015 sera l’année du tout connecté : des voitures en passant par les frigos et bien sur les célèbres bracelets, nos habitudes, nos envies nos signes vitaux sont mesurés convertis et stockés sur des serveurs. Cette tendance venant des États-Unis est en train d’envahir la France à toute vitesse.

Pour autant, le succès durable de ces produits reste à démontrer. Si un Américain sur dix est désormais équipé de capteurs de type Jawbone ou Fitbit, les deux tiers ne les utilisent quasiment plus après quelques mois.

Et si le futur DMP se trouvait déjà dans notre poche grâce aux géants du numérique que sont Google, Microsoft et consorts qui se sont lancés dans une course effrénée au stockage et à l’analyse de nos données de santé ?

Sur la dernière version iOS, l’application Healthbook (« Santé » en version française) a fait son apparition. Elle a pour but de nous healthbookaider à suivre notre santé et propose un onglet « Fiche médicale », regroupant les informations que nous pourrions retrouver dans notre carnet de santé.

Apple pousse le raisonnement encore plus loin en ayant développé une application qui compile dans une seule interface les données provenant des différents matériels utilisés par le possesseur de l’iPhone : bracelets Jawbone, chaussures connectées Nike, balance Withings…

Mais le succès de ces applications n’est pas encore joué. En 2008 Google Health (le service Internet d’archivage de dossiers médicaux) a rencontré un très faible engouement conduisant à son arrêt en janvier 2013.

Google retente actuellement sa chance avec Google FIT lancé à la fin du mois d’octobre et prépare un système de visioconférence pour dialoguer avec son médecin, en ligne.

Avec toutes ces initiatives, de nombreuses questions se posent : quel encadrement juridique autour des données produites et transmises par les objets connectés ? Quelle acceptation par le corps médical de ce nouveau rôle où la partie collecte de données pourra à terme être complètement prise en charge par les équipements du patient ? Se dirige-t-on vers des autodiagnostics par les patients avec les risques que cela comporte ? Comment les assureurs pourraient-ils profiter de ces amas de données ? Y-auraient-ils même accès sous condition de rendre anonyme toutes ces données ?

Si le gouvernement français est en mesure de capitaliser sur les initiatives de Google et d’Apple, le DMP pourrait être voué à un bel avenir ; reste à obtenir le soutien du corps médical.