La Data science présente de nouvelles opportunités pour les assureurs. C’est un changement remarquable dans l’analyse des risques, grâce à la possibilité de connaître le niveau de risque des assurés d’une manière plus lisible qu’avant. Cela permet aux assureurs de limiter et mieux gérer les risques, ainsi que de fixer le montant des primes d’une manière plus personnalisée, en les alignant au niveau de risque correspondant.
La gestion des risques est au cœur du métier des assureurs. Une amélioration de la qualité de la donnée et de son exploitation peut rendre leur analyse plus efficace et rentable pour ce dernier.
Les nouvelles formes d’usage d’algorithmes vont permettre aux données d’être stockées, transformées et analysées plus rapidement et à moindre coût que dans le passé. Les nouveaux modèles d’analyse, appuyés par l’intelligence artificielle débouchent sur l’opportunité de gérer les deux types de données : structurées et non structurées, dans le but de créer de nouveaux modèles d’analyse prédictive.
A titre d’exemple, Direct Assurance revendique une baisse moyenne de 20% des accidents en 2 ans chez ses assurés YouDrive : sa technologie, qui fonctionne avec un boîtier connecté, permet l’analyse des données de la conduite de l’assuré en temps réel. Cette quantité de données récupérée par l’assureur a un impact significatif sur son chiffre d’affaire, ainsi que sur l’amélioration du comportement des conducteurs. En effet, la quantité des données transmises par le boîtier permet l’analyse de risque en temps réel. Ainsi, le calcul de la prime est ajusté au niveau de risque associé.
Quels sont les cas d’usages de la donnée en assurance, quels modèles innovants peuvent être adoptés pour prévenir les risques et quels sont les nouveaux acteurs de la Data et leur relation avec les assureurs ?
Des exemples de cas d’usage de traitement de la donnée en assurance
Fraude à la souscription
La qualification et la détection de fraude sont souvent des opérations compliquées à réaliser. Mais grâce à l’intelligence artificielle qui s’appuie sur l’analyse des données, l’assureur va pouvoir mettre en place des modèles d’analyse prédictive pour faciliter la détection de la fraude.
Par exemple, lors de la souscription d’un contrat d’assurance, l’assuré peut omettre de signaler un élément qui correspond à la réalité de son comportement afin de réduire le montant de sa prime d’assurance. En outre, les conditions générales, et spécifiques, d’un contrat papier sont rigides et ne sont pas modulables avec les éléments fournis par l’assuré. Dans ce cas, les Smart Contracts, des algorithmes spéciaux utilisant la technologie de la Blockchain pour l’automatisation de la signature et la gestion des contrats, y compris les processus de négociation, peuvent être un moyen pour remédier à ces risques.
L’application des contrats intelligents pour les souscriptions, exclut toute manipulation du tiers, parce qu’il n’est pas possible de détourner le code source avec lequel le contrat numérique est écrit. Celui-ci exclut l’intervention humaine dans les transactions, tout est traité par le code de programme prescrit qui réagit en fonction des informations fournies par le client et permet d’améliorer la qualité des données collectées par l’assureur. De la sorte, l’assureur recueillera des informations personnalisées, précises et non erronées.
Fraude lors de la déclaration du sinistre
Un nouveau modèle d’analyse dynamique a été créé à travers la combinaison des données issues des déclarations de sinistres passées, des logiciels CRM et des réseaux sociaux. Ce modèle permet de traiter ces données ensemble et de façon anonyme. Il peut détecter à travers les dernières activités sur les réseaux sociaux, si la déclaration de sinistre qui a été formulée est correcte ou pas.
Par exemple, un client déclare un accident à un endroit et moment précis. A travers l’analyse des données GPS, son statut sur les réseaux sociaux et d’autres applications tierces, le modèle d’analyse dynamique peut vérifier si l’assuré se trouvait sur place lors de l’accident.
Cette méthode de traçabilité est soutenue au niveau réglementaire par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) qui autorise l’assureur à croiser les données personnelles des assurés, ayant pour finalité la lutte contre la fraude.
Le temps réel, une nouvelle façon d’évaluer les risques
Les compagnies d’assurance utilisent, comme critère principal, des données issues d’historiques pour évaluer et déterminer la prime de risques. Auparavant, ils récoltaient les données sur des périodes d’analyse définies, mais aujourd’hui, ils sont capables de les récupérer en temps réel. Il serait alors possible de faire varier le calcul et le montant de la prime en temps réel, d’une manière automatisée, presque comme le cours d’une action en bourse. Cela permettrait notamment d’éviter la surestimation ou la sous-estimation dans le calcul de la prime. De plus, ces données peuvent servir de feuille de route puissante pour prédire les tendances du marché et le comportement des clients.
L’évaluation des risques en temps réel prend plusieurs formes dans le monde de l’assurance. Par exemple, dans le cas d’une activité telle que l’agriculture, il existe des risques liés aux impacts environnementaux et aux changements climatiques. Les produits d’assurance associés restent coûteux tant pour l’assureur que pour le client. De plus, ce processus de traitement des sinistres peut s’avérer long, le délai entre une déclaration et un paiement peut prendre plusieurs mois, voire une année.
En réponse à ce défi, un assureur français s’appuie sur une nouvelle approche dite « paramétrique ». Le principe est simple : un type d’assurance ex-ante avec lequel il est possible d’effectuer un paiement à la survenance d’un événement déclencheur et pas nécessairement lors d’une perte totale. Cette approche consiste d’abord en l’utilisation d’un historique des données météorologiques à travers le monde, issues des stations météorologiques et des organismes statistiques nationaux. De plus, ces données sont corrélées et traitées ensemble, en y ajoutant les prévisions futures et les impacts sur l’environnement comme l’effet de serre. Enfin, lorsqu’une anomalie météorologique est constatée, une indemnisation est enclenchée immédiatement, par exemple sur la base d’un indice de pluviométrie ou d’autres critères sélectionnés par l’assureur qui reflètent l’état de la récolte assurée.
L’un des principes de base de l’assurance est de couvrir la perte potentielle subie par les assurés exposés à la réalisation de risques déterminés, mais dont la réalisation est future et incertaine. C’est pourquoi, il est aisé de comprendre que le développement d’outils d’analyse prédictive soit au cœur des stratégies des compagnies d’assurance. Ainsi, la personnalisation de la tarification devient de plus en plus pertinente aujourd’hui grâce à un nombre de données récoltées croissant, qui permet de minimiser l’écart entre la prédiction et la réalité.
Fort d’une grande base de données clients, certains assureurs vont même plus loin dans la récolte des données et ont lancé sur internet des plateformes sur lesquelles l’assureur partage avec le grand public l’analyse de l’ensemble de ses données sinistres d’une manière anonyme. Ce type de plateforme permet à un particulier, même s’il n’est pas client de l’assureur, de mesurer les risques auxquels son habitation est exposée en rentrant les coordonnées de son quartier. Il peut compléter sa recherche avec les conseils d’experts de l’assurance, sa propre expérience et des astuces pour éviter les risques type cambriolage ou dégâts des eaux. Cette stratégie de données ouvertes permet à un assureur d’être un partenaire proche de ses clients et du grand public et ainsi redonner confiance aux assurés grâce à une meilleure compréhension et maitrise de leurs risques.
Les pure-players de la Data, quelle relation avec les assureurs ?
D’autre part, il existe un écosystème qui prône l’utilisation de la Data dans le secteur de l’assurance avec notamment des startups dont le traitement de la donnée est le cœur de métier. Ci-après, quelques exemples de business models de ces start-up qui vont permettre aux assureurs d’aller plus loin dans la récolte et l’utilisation des données.
Shift technology est une startup parisienne qui développe une solution SaaS en Big Data reposant sur l’intelligence artificielle et l’automatisation de la détection de la fraude.
Toujours dans la sphère de l’intelligence artificielle, Mangrove est une startup qui propose une plateforme de Machine Learning qui permet d’analyser le comportement d’un prospect sur le site d’un assureur, à travers ses « clics » notamment, dans le but d’aider le téléconseiller commercial à déterminer si le client doit être recontacter.
Cytora vient révolutionner le métier de l’actuaire grâce à l’intelligence artificielle. Elle utilise des algorithmes pour améliorer les processus de quantification et tarification des risques. Leur outil permet de quantifier un risque en indexant des données issues de sites web, d’articles de presse et de documents publics.
La data va donc jouer un rôle de plus en plus important et transformer le métier de l’assureur. Calcul des primes, prévention et gestion des sinistres, temps-réel et personnalisation seront au cœur des enjeux. Si les grands groupes d’assurance disposent d’une forte base de données clients et se positionnent fortement sur la récolte et l’exploitation de la donnée ; en parallèle, des startups possèdent une expertise digitale et sont des pure-players du traitement de la donnée. C’est pourquoi il est évident qu’une collaboration entre ces deux mondes doit être au cœur des stratégies Data afin de continuer à automatiser le traitement des données et à terme de pouvoir générer de l’activité en réduisant au maximum le risque à porter.