Notre histoire, quelque peu chaotique et ponctuée de certains différents avec nos voisins, a vu émerger la notion de risque de guerre dans un premier temps puis de risque terroriste. D’abord prévues pour les navires puis étendues aux biens et aux personnes, les assurances ont évolué depuis deux siècles afin de s’adapter aux époques et aux risques inhérents. Le contexte actuel ne fait que confirmer le caractère nécessaire, voire même indispensable  de l’assurance contre ce type de risque. Mais cela n’a pas toujours été le cas, la loi française ayant longtemps considéré ces risques comme étant exclus du domaine légal. Pour pouvoir appréhender le système d’assurance de ce type de risques, il faut avant tout différencier « ce qui est assuré » : le transport (l’assurance maritime qui couvrait historiquement les risques de guerre), les personnes et les biens. En effet, chacune de ces branches est soumise à des régimes légaux différents.

L’assurance maritime : le risque de guerre

Historiquement les risques de guerre étaient liés au transport maritime. Ils constituaient des risques « ordinaires » de la navigation et aucune distinction n’était faite entre les risques de mer et les risques de guerre, ils étaient identiques.

De 1681 à 1967 le risque de guerre était considéré par la législation sur les assurances maritime comme un risque ordinaire (au même titre qu’un incendie) dont devait répondre les assureurs. Cette logique n’a pas été suivie par la pratique qui a peu à peu exclu ce risque des polices d’assurances proposées en raison de l’instauration d’une paix progressive retrouvée sur les mers et de navire de plus en plus onéreux.

La première guerre mondiale verra naître la naissance d’un système où seul le risque « extraordinaire » pourra être couvert et que les assureurs ne pourront plus garantir seuls mais avec l’État. L’assurance des risques de guerre par l’état était au début purement facultatif et devient obligatoire en 1917 afin de permettre à l’économie du pays de pouvoir continuer à fonctionner. Durant la seconde guerre mondiale, le même principe est appliqué dès 1939.

L’après-guerre marque un tournant dans le système, puisque les compagnies d’assurance retrouvent progressivement leur liberté de souscription. C’est en 1967 que la loi change et  dispose que « l’assureur ne couvre pas les risques de  guerre civile ou étrangère … » (article 20 de la loi du 3 juillet 1967) sauf convention contraire. Par ailleurs, l’état se désengage et les assurances ou réassurances des risques de guerre sont pris en charge par la CCR (Caisse Centrale de Réassurance) avec la garantie de l’état (L 431-4 du Code des assurances).

Aujourd’hui, le risque, loin d’avoir disparu, n’a pas le même visage. En effet, le risque de guerre comme on l’entendait avant, une guerre déclarée entre deux États, n’existe quasiment plus et les guerres du XXIème siècle prennent le visage du terrorisme. C’est ainsi que le monde des assurances voit naître le concept de risque terroriste qui semble remplacé, en matière d’assurance aux biens et aux personnes, la notion de risque de guerre qui n’ouvrait à aucune indemnisation.

Assurance aux personnes : quelle articulation entre les garanties personnelles et le Fond de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI)?

Le risque de guerre 

Ce type des risques est exclu du domaine légal. Seule une assurance vie peut couvrir ce risque mais selon des conditions qui doivent être préalablement définis.

Le risque terroriste 

Pour ce risque, la loi prévoie le principe de la réparation intégrale du dommage corporel, celui-ci restant valable pour les victimes d’attentats terroristes. Ainsi, les garanties personnelles comme l’assurance vie, les couvertures d’incapacités, d’invalidité ou de décès seront actionnées dans l’hypothèse d’un attentat.

Par ailleurs, un fond de solidarité nationale a été mis en place afin de prendre en charge « la réparation intégrale des dommages résultant d’une atteinte à la personne » lorsque ceux-ci sont la conséquence d’actes de terrorisme. Le FGTI a ainsi été créé par la loi du 9 septembre 1986 et indemnise les victimes françaises, étrangères ou leurs ayants droit dans la mesure où l’acte terroriste a été commis sur le territoire français. Si l’acte de terrorisme survient à l’étranger, seules les victimes de nationalité française et leurs ayants droits peuvent obtenir une indemnisation.

Le FGTI couvre les dommages corporels des personnes blessées, les préjudices moraux et économiques des ayants droits des personnes décédées mais n’a pas vocation à prendre en charge les dommages matériels. Par ailleurs, le fond tient compte des prestations versées par les organismes sociaux, publics ou privés, dans le calcul des indemnisations qu’il verse.

Le FGTI, est alimenté par la communauté des assurés, il ne reçoit aucune dotation budgétaire de l’État. Pour cela, un prélèvement obligatoire est effectué sur l’ensemble des contrats d’assurance aux biens, prélèvement dont le montant de la cotisation est déterminé chaque année par le Ministère de l’économie et des finances. Enfin, son autonomie financière est également assurée grâce aux produits des recours exercés contre les auteurs et par les produits de placement.


Quelques chiffres :

Depuis 1985 le FGTI a déjà indemnisé plus de 4 000 victimes pour un montant de 106 millions d’euros. Les attentats de 2015 pourraient coûter entre 18 et 20 millions d’euros à la FGTI.

La prélèvement obligatoire était de 3,30 euros par polices d’assurances dommages aux biens, les derniers attentats les ont faites passer à 4,30 euros le 1ier janvier 2016 


L’assurance de biens : l’extension devenue obligatoire de la garantie IARD

Une exclusion légale des risques de guerre

L’article L121-8 du code des assurances dispose que « l’assureur ne répond pas, sauf convention contraire, des pertes et dommages occasionnés, soit par la guerre étrangère, soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou mouvements populaires ». Ce principe peut faire l’objet d’une dérogation conventionnelle qui permet d’assurer certains dommages causés par des émeutes ou faits de guerre. Ainsi, pour obtenir réparation, l’assurer doit prouver par tout moyen que le sinistre résulte d’un fait autre que le fait de guerre étrangère (absence de lien de causalité entre dommage et le fait de guerre) ou qu’il ne puisse pas prouver que le sinistre résulte d’une guerre civile, d’émeutes ou de mouvements populaires

Une exception : la garantie des attentats aux biens

À partir de 1976, les assureurs ont commencé à proposer d’étendre l’assurance IARD (Incendies, Accidents et Risques Divers) aux dommages d’incendies et explosions résultant d’émeutes, de mouvements populaires, d’actes de terrorisme et de sabotages commis dans le cadre d’actions concertées de terrorisme et de sabotage. Cependant, cette garantie restait toujours très précaire dans la mesure où elle n’était accordée que moyennant surprime et pouvait être résiliée par l’assureur avec un préavis de 7 jours.

En 1983, il est devenu possible pour l’assureur de demander l’extension de sa garantie IARD, multirisques habitation ou automobile, aux dommages matériels directs résultant d’incendies ou d’explosions provoqués par des attentats, émeutes, mouvements populaires, actes de terrorisme ou sabotage concertés.

C’est avec la loi du 9 septembre 1986 qui rend l’extension de la garantie aux attentats aux biens obligatoire. En effet, l’article L126-2 du code des assurances dispose que « les contrats d’assurance de biens ne peuvent exclure la garantie de l’assureur pour les dommages matériels résultant d’actes de terrorisme ou d’attentats commis sur le territoire national. Toute clause contraire est réputée non écrite ». Cette obligation s’applique aux contrats qui couvrent les biens professionnels ou privés. Cette loi ne couvre ni les dommages immatériels (préjudice commercial, perte de loyer…) ni les dommages corporels. Le régime n’étant pas le même suivant que le dommage résulte d’un fait de guerre ou d’attentats terroristes, la qualification du fait générateur n’est pas anodine. Une simple qualification d’état de guerre fait perdre à l’assuré tout droit au déclenchement de son extension de garantie pour attentats.

On l’aura compris, ce type d’assurance est très complexe et ne peut être assumée de façon unilatérale par les sociétés d’assurance étant donné son coût. Le système est donc basé sur le principe de réassurance, par un pool d’assureur : le GAREAT et l’Etat (via la CCR).