Réglementation PRIIPs : le nouveau casse-tête du secteur financier
À partir du 31 décembre 2016, banques, assurances, et autres acteurs des places financières européennes devront se mettre en conformité avec les nouvelles obligations de communication sur les PRIIPs (Packaged Retail and Insurance-based Investment Products). Cette communication devra se faire via le KID (Key Information Document), un document très cadré avec des normes techniques qui couvrent aussi bien le fond que la forme. Les concepteurs de produits ou tout autre acteur ayant effectué des modifications sur un de ces produits devra rédiger ce document d’information. Clair et concis, le KID mettra à disposition des investisseurs les informations précontractuelles nécessaires pour qu’ils puissent comprendre le produit et faire leur choix. L’objectif du règlement « PRIIPS » est d’uniformiser l’information précontractuelle remise aux investisseurs non professionnels.
Que sont les PRIIPs ?
Il s’agit de produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance. Ce sont donc des produits d’investissement destinés à une clientèle de détail et pour lesquels le montant remboursable à l’investisseur est soumis à des fluctuations, dépendantes de valeurs de référence ou de la performance d’un ou plusieurs actifs sous-jacents ; c’est-à-dire des actifs que l’investisseur n’achète pas directement.
En assurance, seuls les produits d’assurance-vie dont la valeur de rachat est totalement ou partiellement exposée, de manière directe ou indirecte, aux fluctuations du marché, sont visés. Tous ceux qui relèvent de l’assurance non-vie, ou encore des produits d’assurance-vie avec des prestations payables uniquement en cas de décès, accident ou maladie, ainsi que les produits de retraite, ne sont pas concernés par cette réglementation.
Le KID, un document d’informations clés à produire
Le document d’informations clés devra être réalisé préalablement à toute commercialisation d’un PRIIP. Tout acteur financier ayant conçu un PRIIP ou apporté des modifications sur un produit existant en modifiant sa rentabilité, ses coûts d’investissement ou encore son profil de risque doit produire un KID. Ensuite, le document devra être remis aux investisseurs de détail avant la contractualisation par le distributeur du produit ou le conseiller en investissement.
Ce document doit faciliter les comparaisons entre les produits. Il expliquera donc à l’investisseur en quoi consiste le produit, les risques qu’il comporte, ce qu’il engendre en cas d’insolvabilité de l’acheteur, le processus de réclamation ainsi que les modalités pour récupérer les montants investis, le tout dans 3 pages maximum. Le KID doit aussi faire référence aux KID des actifs sous-jacents quand l’investisseur a la possibilité de choisir ces actifs, ce qui est le cas en l’occurrence pour les assurances-vie en unités de compte.
Un pouvoir étendu pour les régulateurs
La particularité de ce texte réside dans le fait qu’il est transversal et touche à la fois des produits bancaires, assurantiels et de marchés financiers. Dès lors, l’application de cette loi sera contrôlée par trois autorités européennes de supervision : l’ESMA (autorité européenne des marchés financiers), l’EBA (autorité bancaire européenne) et l’EIOPA (autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles).
Pour exercer leurs fonctions, ces autorités européennes auront des pouvoirs alignés avec ceux des différentes autorités nationales des états membres en matière de supervision de produits financiers.
Par ailleurs, en plus de leur rôle de superviseur, les autorités régulatrices européennes et les autorités nationales compétentes auront un pouvoir d’intervention sur les activités des acteurs concernés par cette réglementation. Pour protéger les intérêts des investisseurs et l’intégrité des marchés financiers les autorités européennes peuvent interdire ou restreindre la commercialisation ou la distribution de PRIIPs si elles jugent que les mesures prises par leurs homologues nationaux ne sont pas suffisantes.
Un projet qui passe mal auprès du secteur financier
Cette nouvelle norme européenne devra normalement entrer en vigueur à partir du 31 décembre 2016. Un délai intenable selon les associations des professionnelles du secteur financier. Celles-ci jugent par ailleurs que les normes techniques proposées par la Commission Européenne sont inadaptées et facilitent la désinformation des investisseurs. Elles estiment que le KID cible ne répond pas correctement aux besoins des investisseurs, principalement puisqu’il manque des références aux performances passées du produit ; un historique qui constitue pourtant l’information de base pour le calcul du profil de risque.
En attendant la décision finale du parlement et du conseil européen le 30 septembre 2016 quant aux normes techniques proposées par la Commission Européenne, et même si les associations des professionnels financiers parviennent à décrocher un délai supplémentaire, la mise en conformité avec la nouvelle loi ne sera pas aisée. En effet, outre les défis liés à l’agrégation des données clés et l’industrialisation de la production des KID au niveau du système d’information, les assureurs, entre autres, devront cartographier les produits de type PRIIPs, formuler les KID modèles avec leurs déclinaisons en fonction des options possibles pour chaque contrat, traduire le tout pour couvrir l’ensemble du marché européen et enfin créer une gouvernance permettant de garder les KID à jour. En bref, une mission quasi impossible pour les assureurs, à moins de lancer en urgence le projet de mise en conformité afin de se protéger au plus vite contre des risques réglementaires et opérationnels imminents.