Un an après l’obligation, les détecteurs de fumée sont-ils efficaces ?
En France, un incendie se déclare toutes les deux minutes, causant environ 800 décès par an. Selon le ministère du logement, « 80% meurent intoxiqués par la fumée ». Force est de constater que la majorité des incendies surviennent la nuit, surprenant les occupants du foyer dans leur sommeil. C’est dans le but de diviser par deux le nombre de victimes, que la loi Morange a rendu obligatoire le détecteur avertisseur autonome de fumée (DAAF) dans tout foyer français pour le 8 mars 2015.
Un an plus tard, quel bilan pouvons-nous en tirer ? La mesure est-elle efficace ? Quels sont les impacts à prévoir les assurés et les assureurs ?
Premiers constats : des résultats encourageants
85% des foyers français sont aujourd’hui équipés d’un détecteur de fumée, contre seulement 27% en 2012. Ce résultat encourageant est à prendre avec précaution, car les fabricants de DAAF pensent qu’il y a un biais «surdéclaratif» dans ce sondage. En effet, Gaëlle Alloin, directrice du marketing chez Kidde déclare que selon leurs remontées de ventes, « Selon Pierre Guillemin 2, le bilan est positif, en comparant la France à l’Angleterre cette dernière a mis deux ans pour atteindre 49% de foyers équipés.
7 millions de français restent pourtant dépourvus de détecteurs de fumée. Si la responsabilité du propriétaire est évoquée dans 21% des cas pour justifier le non-équipement, le sentiment d’une absence de risque arrive en deuxième position à 20%. Ces chiffres illustrent bien ce que les experts craignaient, à savoir que la motivation de s’équiper est liée à une contrainte réglementaire et non à une réelle prise de conscience.
De plus, aucune sanction, ni contrôle n’est actuellement prévue par la réglementation en cas de non-installation du détecteur de fumée. L’installation d’un DAAF doit être signalée à l’assurance incendie de chaque logement via une attestation, mais ne figure pas dans le contrat d’assurance.
Et sur le terrain, est-ce vraiment efficace ? « Lors d’une intervention sur deux, le détecteur a eu une action ». D’ailleurs, les secours interviennent plus régulièrement (+ 5%) déclare Didier Remy, chef du service prévention du SDIS de Charente. L’exemple des pays Anglo-saxons à suivre. Ces derniers, qui ont une longue pratique des détecteurs de fumée ont vu leur taux de décès par incendie réduits de moitié.
Votre assureur peut-il exiger que vous soyez équipé ?
Les compagnies d’assurances ne peuvent pas exiger l’installation d’un détecteur de fumée. Elles l’incitent néanmoins fortement, en proposant des offres promotionnelles, telles que remise en cas d’appel à un fabriquant partenaire. ou en offrant un détecteur de fumée pour toute souscription à un contrat multirisque habitation.
La compagnie d’assurance ne peut donc pas se prévaloir du défaut d’installation du détecteur pour s’exonérer de son obligation d’indemniser les dommages causés par un incendie. Dès l’instant où l’incendie est intervenu pendant la période couverte par le contrat, la garantie est valable.
Quel impact pour les assureurs ?
L’essor des objets connectés change progressivement la donne. Par exemple, un grand assureur a lancé depuis peu l’offre ‘Maison connectée’, une offre de services destinée aux clients équipés d’objets connectés pour mieux protéger leur domicile contre les risques d’intrusion ou d’incendie. « Grâce à l’Internet des objets, les assureurs vont passer d’une logique d’indemnisation à une logique de prévention. Ils pourront optimiser la gestion des risques voire réduire les coûts grâce à une intervention plus rapide et plus efficace des services d’assistance », note Simon Castex de Productize.
Jusqu’à présent, l’assureur indemnise un dégât, il a donc une action à posteriori. Mais il sera de plus en plus amené à investir un rôle de coaching avec l’objectif de réduire le risque pour le client. Cela, bien sûr, au travers de la prévention, mais aussi en détectant plus rapidement un risque et un potentiel sinistre pour en limiter les dégâts.