Ça y est ! Plus de 6 ans après son adoption par le Parlement Européen, la Directive Solvabilité II va officiellement entrer en vigueur le 1er janvier prochain. Les compagnies d’assurance et mutuelles françaises ont pu bénéficier des exercices préparatoires mis en place par l’ACPR ces dernières années afin de se mettre graduellement en conformité. À quelques jours de la date butoir, qu’en est-il réellement ? Les acteurs en place sont-ils prêts pour Solvabilité II ? La première partie de notre série sur le thème revient sur bilan de l’ACPR sur l’exercice préparatoire 2015. 

 

Lors de sa conférence du 23 juin 2015, l’ACPR a mis en évidence les écarts importants en matière d’avancement des acteurs de l’assurance sur les différents piliers. Ainsi, si le pilier 1 semble bien maîtrisé avec 97% des organismes prêts à plus de 75%, les piliers 2 et 3 semblent être plus difficiles à appréhender, même si de plus en plus d’entreprises se disent relativement prêtes.

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Source : ACPR, 2015

 

Ce retard sur les piliers 2 et 3 s’explique par la difficulté pour les assureurs d’appréhender certaines notions et donc de les mettre en œuvre de manière opérationnelle et efficace.

Pilier 2 – Le cas du reporting ORSA 

L’un des éléments centraux du Pilier 2, l’ORSA, consiste à évaluer en interne la solvabilité et les risques afin de mieux les maîtriser. Là encore, le bilan de l’exercice préparatoire 2014[1] met en évidence l’avancement inégal des organismes en termes d’évaluation des indicateurs. Ainsi, en 2014, le besoin global de solvabilité avait été évalué par 92% des organismes. L’évaluation du respect permanent des exigences de capital et des exigences concernant les Provisions Techniques était quant à elle plus mitigée, avec une évaluation du SCR dans 82% des cas, mais seulement 31% pour le MCR et 12% pour les risques liés au calcul des Provisions Techniques. Dans 72% des cas, les organismes ont également évalué la mesure dans laquelle le profil de risque de l’entreprise s’écarte des hypothèses qui sous-tendent le SCR, mais ils n’ont chiffré cet écart que dans 20% des cas, ce qui signifie que l’évaluation majoritairement effectuée n’était pas très fiable. La marge de progression avant 2016 est donc très importante, et l’on peut espérer que les assureurs aient tenu compte des indications de l’ACPR pour mieux réussir l’opération d’ORSA préparatoire de septembre 2015. L’ACPR a en effet rehaussé ses objectifs pour cet exercice, avec une volonté d’enrichir les scénarios de solvabilité et de déterminer des actions en termes de stratégie et de gestion des risques et de la solvabilité.

Pilier 3 – Le cas du reporting réglementaire

Le Pilier 3 de Solvabilité II concerne la communication financière des organismes, à travers la mise en place de reportings quantitatifs et de rapports narratifs. Les organismes accusent un fort retard dans la mise en œuvre de ces exigences, puisqu’en 2014 5% d’entre eux n’avaient pas commencé les travaux sur ce pilier, et 31% avaient réalisé moins de 50% des travaux. Plus inquiétant encore, une part importante des organismes était très en retard sur la production des rapports narratifs, 34% d’entre eux n’ayant pas commencé la production, et 39% ayant réalisé moins de 50% des travaux.

Même si 2016 sera un exercice intermédiaire, le dossier annuel de clôture devra être remis au format Solvabilité I au 31 décembre 2015 et les rapports narratifs seront remis en régime cible à partir du premier janvier 2017.

La qualité des données sous Solvabilité II

Le dernier bilan de l’ACPR met en exergue l’insuffisance de la qualité de la donnée fournie par les assureurs. Ceux-ci semblent en effet y être peu sensibilisés, comme l’attestent les faibles taux d’existence d’un système de gouvernance des données ou d’une politique formalisée de qualité des données, respectivement appliqués dans 51% et 31% des cas seulement.

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Source : ACPR, 2015

Pourtant, la qualité de la donnée est un élément essentiel dans la mise en œuvre de Solvabilité II puisqu’elle impacte de manière transverse les 3 piliers. De plus, elle revêt un caractère stratégique pour le pilotage de l’entreprise et constitue un enjeu de taille pour les compagnies d’assurance et de réassurance pour répondre aux défis actuels que sont : le Big Data, le digital Working, la connaissance client et plus largement la Data analytics.

Comment expliquer alors ce retard dans l’appréhension de la qualité des données ? Quelles sont les clés pour la mise en place d’un dispositif de contrôle efficace ? Découvrez-le dans la deuxième partie de notre décryptage sur le bilan de la mise en place de Solvabilité II, le 4 janvier prochain !

 

[1] Les rapports ORSA préparatoires solo et groupe pour l’exercice préparatoire 2015 ont été remis le 18 septembre et le bilan de cet exercice n’a pas encore fait l’objet d’une publication.