Le carnet de santé numérique est de retour : cette fois pour de bon ?
Dans le cadre du projet de loi Santé, l’Assurance Maladie a annoncé le 15 octobre dernier la généralisation du carnet de santé numérique à l’ensemble du territoire d’ici 2017. L’idée n’est pas nouvelle ; ce nouveau « Dossier Médical Partagé » succède en effet au « Dossier Médical Personnel », créé en 2011. Bien que l’utilité d’un tel outil soit reconnue par les professionnels, le DMP n’a jamais réussi à s’imposer et a suscité de nombreux débats.
Le carnet de santé numérique, indispensable pour un système de soins optimisé?
La Cnamts (Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés) a présenté les grandes lignes de son plan pour la généralisation du Dossier Médical Partagé (DMP), qui a vocation à remplacer le traditionnel carnet de santé. Déployé dans 8 territoires pilotes début 2016, puis généralisé dès la fin 2016 par paliers, le DMP est jugé comme indispensable pour assurer une qualité et une sécurité des soins accrues. Ce carnet de santé numérique regroupera les informations administratives et médicales des patients (comptes rendus d’hospitalisation, radiologies, résultats d’analyses biologiques et antécédents médicaux), ainsi que les courriers échangés par le médecin traitant et les spécialistes, des données de prévention (par exemple, des dates de vaccinations) et les volontés des patients en matière de don d’organes et de fin de vie. Le DMP permettra de faciliter l’accès à l’information médicale du patient, pour le médecin comme pour le patient lui-même. Le dossier sera créé par l’assuré depuis son compte Ameli, avec l’aide du médecin traitant si nécessaire et sera accessible par le patient via une application. Le dossier sera « alimenté directement avec les données de remboursements de soins de l’Assurance Maladie » des 12 derniers mois, et sera connecté aux logiciels métiers des professionnels de santé. Plus simple d’accès que la version précédente, il a pour objectif d’améliorer la coordination des soins, notamment dans le cas où plusieurs professionnels sont amenés à intervenir.
De nombreux obstacles à surmonter
Le DMP précédent avait fait l’objet de nombreuses critiques, notamment en raison de son coût très important –plus d’un demi-milliard d’euros à fin 2011, selon la Cour des Comptes qui, dans un rapport rendu en 2013, a déploré une « absence particulièrement anormale et préjudiciable de stratégie » et « un grave défaut de continuité de méthode dans la mise en œuvre d’un outil annoncé comme essentiel à la réussite de profondes réformes structurelles ». Sur 65 millions d’assurés, seuls 558 000 ont créé leur dossier médical personnel, et seuls 6500 médecins l’utilisent. Pour faire mieux que son prédécesseur, le nouveau carnet de santé devra convaincre les médecins à effectuer plus de tâches administratives. La simplicité de l’outil et son adaptation aux logiciels métiers des professionnels est donc indispensable, de même qu’une incitation financière.
Si les professionnels restent à convaincre, les assurés devraient être plus enclins qu’auparavant à utiliser un carnet de santé numérique. Avec le développement d’objets connectés et d’applications santé, les patients souhaitent avoir davantage de visibilité sur leur santé, et pourraient donc encourager la mise en œuvre du DMP. La confidentialité des données étant au cœur des préoccupations, les patients pourront réguler l’accès et masquer certaines informations de leur dossier ; l’accès au DMP sera conditionné à une authentification sécurisée et les professionnels transmettront les informations via une solution de messagerie sécurisée existante, MSSanté.
Plus simple d’utilisation, plus adapté aux besoins des professionnels et des patients, le DMP s’inscrit dans le programme de transformation numérique du système de santé français. Censé éviter les actes médicaux redondants et inutiles grâce à une meilleure coordination entre les professionnels de santé, il reste à prouver que cette nouvelle initiative évitera un nouvel échec et permettra réellement à l’Assurance Maladie de faire des économies…