Vieillissement de la population : système de protection sociale sous tensions
Arrive ce à quoi nous devions nous préparer, il y a plus de vingt ans, si les gouvernements successifs avaient largement communiqués auprès du public que l’allongement de la durée de vie poserait des problèmes de financement, à anticiper.
Mais les mesures prises sont restées insuffisantes malgré la publication en 1991 du « livre blanc » du Premier ministre Michel Rocard mettant en garde notre société des conséquences des inactions qui pèseraient sur l’équilibre social et économique à partir de 2010, différées aux enfants et petits-enfants des retraités de l’époque. Et pourtant l’équité entre générations était bien une préoccupation du moment.
Désormais nous y sommes !
Le vieillissement de la population : problématique à l’échelle mondiale
Si le développement durable fait partie de nos préoccupations environnementales et des mesures incitatives que nous mettons en œuvre pour protéger notre écosystème, il concerne aussi la façon dont notre planète saura gérer la croissance de sa population face à un phénomène de société encore jamais égalé dans l’histoire de l’humanité ; l’allongement de la durée de la vie et le vieillissement de la population.
Alors face à cette nouveauté, de quelles façons les sociétés vont s’y prendre pour appréhender les enjeux qui en découlent et comment transformer en opportunités, les bienfaits d’une meilleure hygiène de vie, des progrès de la médecine et d’une mortalité infantile réduite.
Pour mémoire, depuis 1900, en France, l’espérance de vie a quasiment doublé, passant de 47 ans à 80 ans, selon l’INED (Institut National d’études démographiques.
A horizon 2050, les plus de 60 ans des pays développés représenteront 1/3 de la population, contre 20% aujourd’hui. Les plus de 60 ans des pays émergents passeront de 8% à 20%, selon le CNRS, et leur nombre sera considérable, en taux d’augmentation, deux fois plus rapide que pour les pays développés.
Globalement, les pays émergents seront touchés en premier par ce phénomène, et parmi eux, la Chine et sa très nombreuse population. En 2050, les plus de 80 ans représenteront presque 100 millions de personnes. Il y a dix ans, sans système organisé, comparable à ce qui existe en occident, et malgré une croissance économique récente, le financement des conséquences du vieillissement de la population chinoise ne suffisait pas à assurer décemment la dernière partie de vie des séniors. Aussi depuis cinq ans la Chine a énormément investit dans l’instauration d’un système de protections sociales visant à pallier, entre autre, les conséquences, du vieillissement de sa population. Mais les réorientations d’investissements vers la santé pourraient altérer le modèle économique chinois.
Sur la même problématique, parmi ceux de poids démographiques très importants et concernés par des réformes internes de protection sociales, figurent aussi l’Inde et le Brésil.
Projection des incidences sur la ressource « épargne »
Alors que les dispositifs de protections sociales existent déjà dans les pays développés avec une part importante du PIB, en moyenne 19%, en laissant à la charge des assurés une partie des frais ( à peu près 9%), ceux de la Chine et de l’Inde ne sont encore qu’à 8% de leurs PIB.
Ces mesures sociales à mettre en œuvre, plus ou moins rapidement, auront pour conséquences d’orienter une part d’épargne mondiale vers l’environnement social de chacun de ces pays, plutôt que vers les marchés financiers.
Dans une conjoncture économique mondiale morose qui nécessiterait davantage d’investissements financiers pour relancer l’économie planétaire, ces investissements sociaux risquent de se faire au détriment des marchés financiers dont la conséquence pourrait se traduire par une hausse des taux d’intérêts interbancaires.
Pour rappel, la France emprunte aujourd’hui à des taux historiquement très bas pour assurer son train de vie et sa dette, et partie financée par l’épargne des ménages investie essentiellement en obligations d’état par le biais des produits d’assurance vie. Ces taux d’emprunts étant historiquement au plus bas, que se passera-t-il pour notre société quand ils augmenteront ?
Il est fort à parier que ces bouleversements sociaux annoncés dans les pays émergents puis chez nous, auront certainement de fortes incidences sur nos sociétés occidentales, sur notre mode de vie, et sur nos biens, gagnés et hérités.
Et des impacts pressentis du vieillissement
Les conséquences du vieillissement porteront sur des diverses aspects :
- Sociétale : dans ses rapports, aux plus jeunes (mais aussi l’inverse), au monde « actif », à l’emploi, à l’isolement social, à la consommation, aux infrastructures (collectives et individuelles), aux nouvelles technologies, aux prises de risques, aux loisirs, aux logements, à la télé-assistance…
- Sanitaire : par le biais de structures spécialisées, d’hébergement ou de soins ; via l’accès (géographique et financier) à la médecine préventive/prédictive, aux équipements individuels et aux objets connectés au service de la médecine.
- D’épargne : épargner suffisamment longtemps avant la retraite, grâce à la souscription de produits financiers à long terme, afin de se constituer une épargne de prévention et de financement de services à la personne.
- De protection : avant la retraite, par la souscription de produits de prévoyance avec services, de type produit « décès ».
- Patrimoniaux : par les préoccupations de transmissions aux proches.
Zoom sur la France
En France, selon l’INSEE, la part des 60 ans ou plus dans la population va augmenter jusqu’en 2035, passant de 23% à 31%, ce qui correspond au passage à 60 ans de toutes les générations du baby-boom (ceux nés entre 1945 et 1960). Les plus de 75 ans qui étaient 5,2 millions en 2007, (8,9% de la population) seront 11,9 millions en 2060 (16,2% de la population) et les 85 ans et plus passeront de 1,3 à 5,4 millions, soit quatre fois plus qu’aujourd’hui.
Comment cela se traduit-il sur la consommation française et quelles sont les opportunités en perspectives ? A suivre dans un prochain éclairage.