Semaine thématique : la silver économie et l’assurance – article 3/4

Après la promesse de François Hollande de généraliser la complémentaire santé aux retraités d’ici 2017, la solution de contrats « labellisés » retenue dans ce but a fait l’objet de vives critiques du monde mutualiste. Elle a donc été mise de côté au profit d’une réforme de la loi Evin, qui instaure un plafonnement progressif des tarifs de complémentaire santé pour les jeunes retraités mais supprime tout plafonnement à partir de la quatrième année de retraite.

Généralisation de la complémentaire santé : les retraités exclus de cette mesure

Lors du congrès de la Mutualité Française de 2012, François Hollande avait promis une « mutuelle de qualité pour tous » au terme de son mandat. C’est dans cette optique qu’a été conclu un accord national interprofessionnel (ANI) qui, depuis le 1er janvier 2016, impose à toutes les entreprises privées de proposer à leurs salariés une complémentaire santé collective, dont au moins la moitié doit être prise en charge par l’employeur.

seniorMalgré l’avantage non négligeable que cette généralisation représente pour les salariés, les retraités en sont exclus. En souscrivant une complémentaire santé à titre individuel lors du départ à la retraite, ces derniers doivent en effet renoncer à la part de cotisation prise en charge par l’employeur.

Cela entraîne une hausse brutale des frais de complémentaire santé – qui passent selon la Mutualité Française de 283 à 998 euros par an en moyenne – souvent couplée à une baisse du pouvoir d’achat et des tarifs qui augmentent avec l’âge. La Mutualité estime que les retraités paient leur complémentaire santé 3,5 fois plus cher que les salariés, ce qui pousse 5,7% d’entre eux à ne pas souscrire du tout.

Des pistes de généralisation de la complémentaire santé pour les retraités

Face à cette problématique, François Hollande avait annoncé en juin 2015 la généralisation de la complémentaire santé aux retraités pour 2017. La solution retenue avait été de mettre en place des contrats « labellisés » destinés aussi bien aux retraités qu’aux salariés de 65 ans ou plus souhaitant en bénéficier, afin d’encadrer les garanties et les tarifs des complémentaires santé pour cette tranche d’âge.

Deux décrets devaient introduire ce dispositif au 1er janvier 2017, mais de vives critiques des acteurs de la mutualité ont remis en cause son adoption. Ceux-ci ont notamment dénoncé la segmentation catégorielle induite par une labellisation des contrats seniors, ainsi que le manque d’intérêt de ce dispositif qui ne répond pas aux besoins spécifiques de cette tranche d’âge en matière de soins. À titre d’exemple, la Mutualité Française cite que les garanties prévoient de couvrir l’orthodontie dont les plus de 65 ans n’ont généralement pas besoin, au détriment de soins plus pertinents pour eux comme l’implantologie.

Suite à ces critiques, le projet de labellisation des contrats seniors semble avoir été mis de côté par le gouvernement de François Hollande. En lieu et place de ce dispositif entrera en vigueur au 1er juillet 2017 une réforme de la loi Evin de 1989 sur la protection sociale complémentaire. Celle-ci introduit un plafonnement progressif des tarifs de complémentaire santé sur les trois premières années suivant le départ à la retraite. Aucune règle de plafonnement n’est toutefois prévue à partir de la quatrième année de retraite, ce qui sous-entend que les mutuelles pourront alors fixer les tarifs de leur choix.

Vers de nouvelles hausses tarifaires ?

Bien qu’elle évite des hausses trop brutales des frais de complémentaire santé au départ à la retraite, cette réforme n’est cependant pas favorable aux retraités de longue date. Alors que le texte original de la loi Evin prévoyait une hausse maximale de 50% des frais de complémentaire santé des retraités sans limite de durée, la réforme supprime tout plafonnement à partir de la quatrième année de retraite.

Il reste à voir comment les mutuelles adapteront leurs tarifs à ce nouveau dispositif : en profiteront-elles pour instaurer d’importantes hausses tarifaires dès la quatrième année de retraite, ou le jeu de la concurrence les poussera-t-il à tirer les prix vers le bas ?

Le nouveau gouvernement attendu en matière de complémentaire santé

Par ailleurs, le gouvernement d’Emmanuel Macron devra aussi préciser sa politique en matière de complémentaire santé. Le président de la République avait évoqué l’idée d’instaurer trois contrats-type lors de sa campagne, qui permettraient de garantir la transparence et faciliter les comparaisons des offres proposées par les assureurs et mutuelles.

Le contour de cette mesure demeure flou, mais semble s’inscrire dans la continuité des contrats labellisés de François Hollande avec une généralisation à l’ensemble des classes de la population. Il faudra donc attendre une annonce officielle du gouvernement pour en savoir plus, sans oublier la réaction du monde mutualiste qui suivra sans doute rapidement.