Un récent rapport du GIEC tire le signale d’alarme : le réchauffement climatique n’est pas sans conséquence sur l’humanité, particulièrement au niveau des maladies. Certains chiffres évoquent même plus de 250 000 décès à cause de pathologies liées à la malnutrition ou un accès à l’eau potable défectueux.

Alors que l’on parle majoritairement des risques environnementaux pour les assureurs, on recense moins d’articles sur les impacts sanitaires sur la santé des individus

Au-delà des chiffres qui font parfois froid dans le dos, il peut donc être intéressant de s’appesantir quelques instants sur l’évolution du paysage des risques santé.

 

Des pathologies nouvelles qui n’en sont plus ?

Chikungunya, H1N1,… tous ces vocables nous sont désormais bien connus, presque « familiers » alors que dans les années 2000, personne n’en avait connaissance.

Cette évolution des pathologies met en exergue des risques qui évoluent avec des infections, jadis circonscrites à des zones géographiques précises, qui sont dorénavant devenues mondiales. La répartition des agents pathogènes, des bactéries et des virus obéit à présent à des règles de plus en plus imprévisibles qui rendent les calculs de prévisions complexes.

Par ailleurs, le réchauffement climatique redistribue les cartes de la localisation des agents porteurs de maladies : ainsi des moustiques toujours plus présents, comme en témoignent de récentes cartes réalisées.

Dans un autre registre, les allergies et les troubles pulmonaires risquent de se multiplier à mesure que le climat se réchauffe : certaines études font état d’une augmentation de la concentration de pollens dans l’air et potentiellement du renforcement des crises d’allergie.

 

Des impacts sur la vie quotidienne et le mode de vie ?

Après l’épisode caniculaire de 2003 et son lourd bilan humain, il convient nécessairement de prendre en considération les conséquences potentielles d’un réchauffement sur les pics de mortalité. Certes, les pays développés peuvent toujours prendre les dispositions nécessaires et tirer les enseignements des précédents épisodes, mais, pour les zones moins riches, la donne est parfois toute autre.

De même, les épisodes extrêmes d’inondations bouleversent dans la durée les conditions d’hygiènes. Même si, en France, l’Etat dispense des conseils sur les bons réflexes à adopter, il n’est pas sûr que ce soit le cas dans tous les pays. Une étude de l’OMS mentionne d’ailleurs, outre des traumatismes directs, des impacts à plus long terme eu égard à la difficulté d’accès à l’eau potable qui engendre dans certains cas l’apparition de maladies.

Par ailleurs, la santé pourrait être impactée indirectement au travers de l’agriculture et de l’alimentation : des denrées raréfiées, des tensions tarifaires associées – comme l’inflation du prix du blé, suite à la sécheresse en Ukraine – et des régimes alimentaires moins variés auront à long terme une incidence sur l’état des populations, et in fine sur l’espérance de vie.

A noter, tous les pays ne sont pas égaux face à ces risques. Les disparités de niveau de vie et de situations géographiques fragilisent parfois l’habitat et les conditions hydrographiques. En effet, avec le réchauffement climatique, des zones entières de la planète souffrant d’infections liées aux eaux stagnantes ou à proximité d’animaux « migrants climatiques » seront probablement davantage frappées.

En ce sens, les plans d’urbanisation seront éventuellement remodelés à cause de zones devenues « inhabitables », des contrôles plus réguliers de la qualité de l’eau seront pratiqués dans des pays régulièrement touchés par les inondations ou les tempêtes.

Ainsi, les acteurs publics et principalement l’Assurance Maladie en France par exemple, vont devoir intégrer tôt ou tard cette tendance tant sur le plan du mode de vie que des maladies.

 

En France, quel rôle pour l’Assurance Maladie face à ces risques avec un financement contraint ?

Face à une probable recrudescence des maladies, l’Etat devra vraisemblablement faire face – si l’on reste dans des modalités de remboursement actuelles – à des surcoûts non négligeables.

Lorsque l’on sait que les finances de l’Assurance Maladie sont dans le rouge malgré une légère amélioration, nous sommes en droit de nous poser la question de la pérennité du modèle actuel. Faudra-t-il repenser les remboursements en intégrant les impacts de ces nouvelles pathologies (coût des médicaments, des arrêts de travail plus longs, …. ) ? Les assureurs seront-ils davantage impliqués dans le remboursement ?

Force est de constater que la mesure des impacts économiques demeure complexe à l’heure actuelle. Mais il n’empêche que l’on ne peut raisonnablement faire fi de ces conséquences alors que les premiers effets perceptibles se font déjà sentir.

A défaut d’une éventuelle politique moins généreuse de l’Assurance Maladie, il est envisageable de développer / renforcer la politique de communication nationale sur les risques sanitaires, favoriser la recherche scientifique en impulsant une dynamique de coordination des travaux.

Face à ces enjeux, les compagnies d’assurance pourraient voir leur rôle évoluer pour s’adapter aux contraintes à venir de l’Assurance Maladie.

 

La place des assureurs : accélérer la prévention, proposer de nouvelles offres et participer aux actions de la Cité ?

Les récentes déclarations et la mise en place d’une plateforme web qui recense les engagements éco responsables des assureurs, plaident pour une vraie prise de conscience du secteur.

Néanmoins, l’accélération mise sur la prévention / l’information traduirait cette attention, dans le domaine de la santé. Des applications météo qui agrègeraient diverses informations sur ces risques : taux de pollens, concentration de moustiques, vague de chaleur tout en prodiguant de bons conseils s’avèreraient utiles. En France, le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (RNSA) ou des sites spécialisés sur la présence de moustiques qui informent régulièrement la population seraient alors des partenaires adéquats pour les compagnies d’assurance.

Les assurances complémentaires seraient capables de pallier une probable limitation de remboursement de l’Assurance Maladie, en indemnisant davantage leurs assurés contre une revalorisation du contrat. De même, à côté des recommandations, il est possible que des garanties voire des produits dédiés à ces nouvelles pathologies puissent voir le jour, en plus de recommandations. Dans ces conditions, les assurés devront prendre leurs précautions quant aux informations, nécessairement personnelles, qu’ils souhaiteront divulguer.

Malgré tout, le sujet intéresse, preuve en est, certains comparateurs en ligne distillent déjà leurs conseils à ce sujet.

Enfin, à l’heure où l’on parle de développement durable et d’investissement « vert » avec les Investissements Socialement Responsables ou ISR, la thématique santé publique pourra en être l’un des axes de développement. Dès lors, les investissements sur des projets alternatifs pour l’agriculture, la participation à des campagnes de sensibilisation de la population, voire le financement de fonds dédiés aux « biotech »expertes en recherche médicale, concrétiseront cet état d’esprit « développement durable ».

 

La responsabilité des gouvernements

A l’heure où la COP21 bat son plein, la prise de conscience des gouvernements et des acteurs de la santé évolue. Alors que des pays en ont fait leur cheval de bataille, à l’instar de l’Europe, d’autres semblent quasiment hermétiques aux impacts sanitaires.

L’ONU apporte son appui aux initiatives locales et, via l’OMS fournit rapport et alerte sur les risques de santé, mais la coordination mondiale peine parfois et l’énergie transmise ne trouve pas toujours de traduction concrète.

Quoiqu’il en soit, l’évolution climatique obligera sans doute tôt ou tard les pays à faire évoluer leur politique sanitaire de manière plus ou moins brutale avec des effets pervers liés à des déplacements climatiques de populations entières.

 

 

Au moment où la COP21 est un des moments où les consciences et les mentalités sont plus sensibles à ces enjeux. C’est dans ce cadre que les impacts sanitaires et environnementaux pourront être débattus, partagés afin de se préparer au mieux à ces bouleversements ou catastrophes climatiques d’origine naturelle qui, comme l’indique le climatologue Jean Jouzel, « sont la conséquence des activités humaines ».